Black Rain

29/04/2024 | Analyses d'Elkano AM

« Black rain » est un film policier sorti en 1989 et tourné en grande partie au Japon. Des policiers américains (Michael Douglas et Andy Garcia) sont lancés à la poursuite de yakuzas faux-monnayeurs dans l’ambiance triomphante d’un Japon avant-gardiste pour l’époque.

Ce film, qui baigne dans une lumière assez particulière propre au réalisateur Ridley Scott, n’a pas eu un succès immense mais a le mérite d’avoir été tourné exactement au moment où la bourse japonaise touchait des sommets avec un Nikkei qui avait atteint 40 000 points en décembre 1989. Les marchés actions japonais représentaient alors près de 45% de l’indice des actions mondiales (le MSCI World) alors qu’ils ne représentent plus que 5% de ce même indice aujourd’hui.

L’appréciation de la devise japonaise avait été fulgurante puisqu’elle avait doublé en l’espace de dix ans, mettant à la mode le terme japonais « Endaka » (Yen fort). Le japonais était alors enseigné dans toutes les écoles de commerce occidentales.

Une suite moins glorieuse

Cependant, la suite fut moins glorieuse avec une perte de compétitivité, une crise démographique et l’éclatement d’une bulle immobilière massive qui a vu la population japonaise financer ses achats immobiliers avec des emprunts à cinquante ans. Une des justifications des prix de l’époque était qu’il n’y avait plus de place sur l’île pour construire des logements mais c’était sans compter sur le fait que le nombre de Japonais allait bientôt diminuer.

Un Nikkei stagnant sur des niveaux de 8000 à 9000 points au cours des années 2000 allait conduire à la disparition progressive des actifs japonais dans l’univers des placements usuels tout comme ce fut le cas de l’enseignement du japonais dans nos écoles de commerce.

Un retour sur les 40 000 points 34 ans plus tard

Néanmoins, à compter de 2012, la bourse japonaise sort progressivement de sa torpeur avant de connaître une très forte accélération depuis mars 2023 avec un gain en Yen de près de 50%. Après plus de 34 ans de purgatoire, l’indice japonais a dépassé à nouveau les 40 000 points en mars 2024.

La hausse spectaculaire de ce marché boursier plutôt industriel est liée à la dynamique mondiale de croissance mais également à une composition très technologique (plutôt semi-conducteurs et outillage de précision que logiciel) qui représente près de 50% de l’indice avec des valeurs comme Tokyo Electric, Adventest et Softbank dans le top 5 des plus grosses capitalisations.

La baisse du yen a permis de sortir de la déflation

Les problèmes structurels de l’économie japonaise n’ont pas complètement disparu, notamment sur le plan démographique. Mais une politique monétaire très permissive pendant des années a fini par venir à bout d’un des symptômes qui affligeait l’archipel : la déflation.

Cette politique volontariste a eu une victime collatérale qui explique également la bonne tenue des marchés actions : le yen. En effet, ce dernier a perdu près de 50% de sa valeur contre les principales devises depuis 12 ans dont 20% rien que sur l’année dernière.

Ainsi, le salaire moyen japonais qui dépassait de 25% le salaire moyen américain en 2012 n’atteint plus que 60 % de ce dernier en 2024, augmentant très significativement la compétitivité de l’économie japonaise.

La performance significative des marchés actions japonais nous a conduits à vendre toutes nos positions.

Des moteurs qui nous semblent devenus vulnérables

Cette performance significative nous a conduits à vendre toutes nos positions restantes sur le Japon le mois dernier : en effet, les deux moteurs qui propulsaient l’indice (la technologie et la faiblesse du yen) nous apparaissent désormais extrêmement vulnérables à un retournement de conjoncture ou un changement de politique monétaire.

Une baisse de l’euro pourrait relancer l’économie mais attention à la Chine

En conclusion, nous pouvons constater que la baisse des devises favorise en général les marchés actions locaux dans les pays développés surtout si leurs indices ont une dominante industrielle.

Le même phénomène peut être constaté aujourd’hui en Grande-Bretagne et c’est ce que nous pourrions également constater plus largement sur les marchés européens en cas de baisse des taux de la BCE qui aurait pour conséquence d’affaiblir l’euro.

Cependant, cette politique de dévaluation compétitive n’est pas trop déstabilisante si elle reste l’apanage de zones économiques petites ou moyennes. En revanche, si la Chine, après avoir épuisé toutes ses sources de relance, devait suivre cela serait beaucoup plus déstabilisant pour l’économie mondiale comme l’a montré le précédent de 2015.

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