Gojira !

17/09/2024 | Analyses d'Elkano AM

Le titre de notre chronique de rentrée, qui signifie Godzilla en japonais, est à la fois un hommage à nos « voisins » métalleux landais, qui furent l’une des attractions de la cérémonie d’ouverture des JO de Paris, mais également une allusion à l’implosion, début août, du carry trade sur les actifs japonais, qui a bien failli faire vaciller les marchés en pleine semaine olympique. Fort heureusement, cela s’est assez vite calmé, et l’été a pu s’achever sans trop de soubresauts sur les marchés. Mais la stabilité relative de ces derniers durant la trêve estivale masque quelques développements significatifs qui risquent de peser à l’automne. C’est ce que nous allons tenter de décrypter.

Quatre éléments majeurs dont les conséquences risquent de se faire sentir

L’été a été marqué par au moins quatre événements importants, dont les répercussions se feront probablement sentir à la rentrée.

Tout d’abord, la fin du carry trade sur le yen. Pour rappel, le carry trade consiste à emprunter à taux faibles pour investir dans des actifs plus risqués. L’augmentation surprise des taux par la Banque du Japon début août a provoqué le débouclage en catastrophe de nombreuses positions, entraînant notamment une chute de plus de 10 % du Nikkei en une seule journée, ainsi qu’une augmentation très importante de la volatilité des marchés actions. Même s’il s’agit avant tout d’un positionnement technique, les conséquences ont été exacerbées par l’absence de liquidité durant le mois d’août. Cependant, la réaction des marchés actions japonais et du Nasdaq américain montre que ce soutien non négligeable aux marchés les plus spéculatifs, comme les actions liées à l’IA (nous y reviendrons), a désormais disparu.

L’été a également été marqué par une série de résultats médiocres pour les valeurs liées à l’intelligence artificielle (IA). De plus, les doutes concernant l’absence de perspectives de rentabilité suffisante pour les énormes investissements liés à ce secteur commencent à se répandre dans la communauté des investisseurs.

Nous avions toujours pensé que l’élection présidentielle américaine de 2024 ne serait pas une réplique de celle de 2020, notamment à cause des risques liés à l’âge des candidats. Effectivement, l’abandon de Joe Biden a complétement relancé la course, qui s’annonce extrêmement serrée. Le résultat final se jouera probablement en Pennsylvanie, mais nous aurons l’occasion d’y revenir.

Enfin, l’annonce la plus importante de l’été fut probablement celle de la Réserve fédérale américaine (FED), qui a déclaré vouloir entamer un cycle de baisse des taux en septembre. Cette nouvelle a permis de soutenir les marchés à court terme. Cependant, au-delà du nombre et de l’ampleur des baisses, c’est l’interprétation de cette décision qui nous paraît importante.

 L’interprétation de la baisse des taux de la FED par les marchés est-elle la bonne ?

Il est clair que la banque centrale a pris cette décision en raison d’une remontée progressive, mais encore relativement faible, du chômage. Clairement, les probabilités d’une récession ont augmenté. Les marchés, qui restent néanmoins dans une optique de soft landing (atterrissage en douceur) certes moins prononcée, ont acquiescé et réclament désormais une baisse de 100 points de base en l’espace de quatre mois, que la FED devrait partiellement satisfaire avec une baisse initiale de 50 points de base dès cette semaine.

Cela soulève néanmoins quelques interrogations :

  • Ce genre de perspective de baisse n’a lieu que dans des situations de chocs économiques et financiers.
  • Les marchés actions semblent ignorer l’aggravation progressive des perspectives économiques et accordent une confiance peut-être excessive aux banques centrales.
  • L’IA semble avoir cessé de jouer son rôle de moteur des marchés et présente désormais des risques en cas de matérialisation des doutes sur ses perspectives financières.

Le choc initial d’une baisse potentielle de 50 points de base a ranimé quelque peu la spéculation, mais ce rebond devrait, selon nous, vite atteindre ses limites.

Le monstre va-t-il se réveiller ?

En ce qui nous concerne, nous avons choisi de privilégier l’investissement en obligations d’État, qui tendent à toujours bénéficier des cycles de baisse des taux, combiné à une exposition limitée à des actions défensives ou bien très sous-évaluées (pays émergents hors Chine, actifs britanniques, foncières cotées européennes). Ce portefeuille nous a permis de passer un été tranquille avec une performance positive, et nous entendons maintenir ces positions. En effet, à l’instar du film cité, dans lequel les ondes de choc d’une explosion réveillent le monstre, nous craignons que les soubresauts, finalement mesurés, de l’été ne soient que les prémices d’un automne plus chaotique.

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